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1360. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Saint Augustin s’humilie devant Dieu, « Tu es grand, Seigneur, et infiniment digne d’être loué. » Et ce Dieu qu’il invoque en commençant, pour mieux s’assurer contre toutes les tentations de la fausse honte, il se met en sa présence à chaque aveu ; il le prend à témoin de l’exactitude de ses souvenirs. « Oui, c’est bien ainsi que j’étais, je m’en souviens. Voici mon cœur, ô mon Dieu, tu vois que je m’en souviens. » Et pourtant cette humilité, cette résolution de n’affirmer que ce qu’il croyait voir dans les obscurités de sa mémoire, sous le regard et avec le témoignage de Dieu, n’avaient pas empêché la complaisance pour lui-même de se glisser jusque dans sa pénitence. […] Pour ceux dont le sens moral est à l’épreuve de ses doctrines sur le droit de jouir, de sa politique par la souveraineté de l’individu, de sa morale fondée sur la double chimère de l’innocence naturelle de l’homme et de la corruption irréparable des sociétés : pour ceux-là, ce qui leur reste de cette lecture, c’est, parmi quelques souvenirs charmants, une impression attristante de ce mélange de lumière et d’ombre, de vrai et de faux, de hauteurs et de chutes, dans des ouvrages où les mauvais esprits deviennent pires, où les bons ne deviennent pas meilleurs.

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