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417. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Il profite d’un moment de mieux pour faire ce que tout bon serviteur et fidèle sujet faisait alors : de même qu’il s’arrange pour se réconcilier avec Dieu, Gourville veut voir une dernière fois le roi ; il se fait conduire sur son passage à Versailles, reçoit de lui un dernier mot d’attention et de bonté, et, ce devoir accompli, il rentre dans sa chambre pour n’en plus sortir. […] À la bataille de Seneffe, étant à côté du prince de Condé, il reçoit une balle dans sa culotte, et il croit prudent de se mettre à couvert dans une grange, d’où sortent à l’instant deux braves jeunes officiers qui s’y étaient mis, et qui n’y veulent plus rester dès qu’on les y voit. […] Il s’y ennuie fort pourtant, et, lorsqu’il obtient de sortir, il n’y tenait plus. […] Il s’était chargé de débrouiller les affaires de cette maison qui étaient dans un effroyable désordre, tellement que le Grand Condé ne pouvait sortir sans trouver dans son antichambre (qu’il ne traversait jamais assez vite, infirme de jambes comme il était) une double haie de créanciers à qui il ne savait que dire. […] Il n’eut pas même à se consoler, et se sentit à l’instant soulagé comme un philosophe qui a trouvé le port et qui n’en sort plus.

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