Ces pensées qui se pressent dans l’esprit sans qu’on puisse les changer en acte de la volonté, le contraste singulier d’une vie beaucoup plus monotone que celle des anciens et d’une existence intérieure beaucoup plus agitée, causent une sorte d’étourdissement semblable à celui qu’on prend sur le bord de l’abîme ; et la fatigue même qu’on éprouve, après l’avoir longtemps contemplé, peut entraînera s’y précipiter. […] Nous soutenions donc « que la poésie, comprise en général comme l’a comprise Byron, est la seule qui sorte des entrailles mêmes de la société actuelle, qu’elle découle naturellement de la philosophie du Dix-Huitième Siècle et de la Révolution Française ; qu’elle est le produit le plus vivant d’une ère de crise et de renouvellement, où tout a dû être mis en doute, parce que, sur les ruines du passé, l’Humanité cherche un monde nouveau ». […] Il faudrait comparer Werther à Faust, et montrer le rapport intime qui unit ces deux ouvrages de Goethe : on obtiendrait ainsi une sorte de type abstrait de la poésie de notre âge. […] Il raconte donc une multitude de faits personnels pour montrer comment de toute son existence sortit un jour Werther, écrit (ce sont ses expressions) dans une sorte de somnambulisme.