Plus tard elle se rappela qu’un jour, un soir, six mois environ après le mariage, elle qui était inquiète d’ordinaire et toute à la minute quand son époux ne rentrait pas, avait laissé sonner l’heure à la petite et à la grosse horloge sans faire attention et s’oubliant à quelque rêverie. […] A force de voir Mme de Pontivy, de s’intéresser à ce mari en fuite, de chercher du moins à maintenir les biens, à force de visiter les gens du roi convoqués à l’Arsenal, et de rapporter son peu de succès à la cliente qu’il voulait servir, il l’aima, et ne put plus en douter un soir que son cœur, comme de lui-même, se trahit. Mme de Pontivy était plus charmante ce soir-là que de coutume ; la mode des paniers, qu’elle adoptait pour la première fois, faisait ressortir la finesse d’une taille qui n’en avait pas besoin ; une langueur plus douce semblait attendrir sa figure, soit que ce fût l’effet de la poudre légère répandue sur ses boucles de cheveux jusque-là si bruns, soit que ce fût déjà un peu d’amour. […] Il allait se hasarder à une démarche, quand, un soir, en entrant chez Mme de Ferriol qui avait nombreuse compagnie, il y trouva Mme de Noyon et sa nièce déjà arrivées. […] A ce soir donc, chez ma tante. » Et elle s’échappa là-dessus, et courut à la petite porte qui donnait vers le couvent voisin, le laissant assez étonné de sa brusque sortie, et comme si, dans ce début nouveau qu’il implorait, elle essayait déjà les ruses des premières rencontres.