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881. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Il faut que tu saches le violon, parce que si tu es prisonnier, de guerre dans un village, tu pourras faire danser les paysans et ça te rapportera quelques sous, et si tu es prisonnier dans une ville, on pensera de toi que tu es un jeune homme distingué, appartenant à une bonne famille et cela t’ouvrira les sociétés et te fera faire de bonnes connaissances. […] * * * — Dans les sociétés de la vie, le lendemain ne rit jamais comme la veille. […] Le cercle pour le haut, le café pour le bas, voilà où aboutiront la société et le peuple… De là une impression de passer là-dedans, ainsi qu’un voyageur. […] * * * — Peut-être n’y a-t-il de bien vraie liberté pour l’individu, que lorsqu’il n’est pas encore enrégimenté dans une société parfaitement civilisée, où il perd l’entière possession de lui-même, des siens, de son bien. […] C’est étonnant, c’est particulier comme cette génération de 1830, comme cette société de Gavarni, qui n’était pas une exception, s’amusait de peu, et quelle ingénuité de la première jeunesse restait à ces hommes qui avaient très peu besoin du fouet et du charme irritant de l’orgie, et qui semblent avoir passé beaucoup de leur vie avec des bourgeoises très adultes ou mariées, nourrissant des tendresses secrètes pour eux.

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