Enfin, pour ceux qui ont joué là dans leur enfance, un souvenir lointain, triste ou gai, s’y joint, qui est à nous seuls et qu’on ne partage avec personne. […] Lui seul entendra, chaque fois que le mot sera prononcé, certain sifflement de balle, certain amortissement de ce bruit dans la chair vivante, lui seul verra certaine grimace, certaine contorsion de l’homme qui meurt, certain geste indifférent du vieux soldat, certaine colère du vaincu, lui seul évoquera certain regard d’un ennemi rencontré dans une charge, certaine parole, certaine lumière, certain paysage : un monde d’impressions ressenties une seule fois par un seul homme surgira au son de deux syllabes banales. […] Le mot qu’on prononce accroche un vers, une phrase où quelque écrivain l’a logé : et il nous amène les autres mots qui y sont avec lui, bien qu’on n’ait affaire que de lui seul. […] » dit Vendôme dans la tragédie de Voltaire. — Couci couça », répond un plaisant du parterre, et ce mot, que l’oreille seule suggère, se trouve être un jugement sur la pièce, et la tue. […] Le chevet de la cathédrale avec ses aiguilles et ses contreforts articulés, tout petit, en un seul tas, semblait la carapace vide d’un crabe.