Et elle le rappelait surtout par la violence inouïe des sentiments, et par ce souffle de profond mysticisme qui l’élevait bien au-dessus d’un sentiment vulgaire et passager, et qui le rendait si profondément, si irrémédiablement tragique… Qu’on veuille bien relire Tristan ; et que ceux qui ont l’esprit faussé par les platitudes philosophiques tâchent à comprendre ce que signifient ces invocations de la Mort, seule réparatrice, et ces malédictions de l’Amour. — Notre maître était lui-même bien près du « Tod durch Liebesnoth ». […] Il y a lieu d’admirer deux choses, et presque contradictoires : la conscience ce vrai savant avec laquelle Wagner a évidemment étudié toutes les sources, et le génie avec lequel il a su discerner ce qui était bon à prendre dans chaque, et ce qu’il fallait inventer pour transfigurer le tout et le rendre acceptable au sentiment moderne. […] Seulement cette vie violente, enfiévrée, est tout entière d’émotions ; à peine un mince à ce sentiment logique la relie-t-elle au monde de la pensée. […] Wagner dit (IV, 174) : « Le poète prend de nombreux faits épars, tels que la raison les perçoit, des actions, des sentiments, des passions, et il les fait converger, autant que possible, en un seul point ; c’est ainsi qu’il peut arriver à agir sur l’émotion. […] Voilà, en peu de mots, de quoi se compose le « gefühlswerdung des Verstandes » c’est-à-dire la compréhension par le sentiment.