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1096. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Invoquant une opinion de Claude Bernard, d’après laquelle la méthode expérimentale exige trois facteurs, le sentiment, la raison et l’expérience, et, citant cette phrase de ce dernier : « C’est un sentiment particulier, un quid proprium qui constitue l’originalité, l’invention ou le génie de chacun », Zola s’écrie : « Voilà donc la part faite au génie, dans le roman expérimental… La méthode n’est qu’un outil ; c’est l’ouvrier, c’est l’idée qu’il apporte qui fait le chef-d’œuvre. » On peut se demander ce que vient faire là ce quid proprium, étant donné le principe de Claude Bernard et celui de Zola, calqué sur le premier ; je trouve ce sentiment particulier absolument incompatible avec la théorie générale de la vie incluse dans la méthode expérimentale. Si nous supposons, en effet, un expérimentateur pourvu de ce « sentiment particulier » jusqu’au génie, devenu lui-même sujet d’expérience pour un second expérimentateur, ce dernier pourra t-il analyser le génie de son sujet à l’aide de la méthode expérimentale ? […] Je ne sais pourquoi quelques-uns de ses personnages et de ses tableaux m’apparaissent comme un artifice de réalité, et me semblent créés par la volonté violente d’un esprit tout plein d’une formule, au lieu de jaillir naturellement du contact de la nature, du pur et simple sentiment de vie dans l’être du romancier. […] 20 » Tel est, en toute justice, le sentiment que son œuvre a fait naître en moi.

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