La littérature française est bien riche, si on la suit dans ces genres un peu secondaires (journaux, correspondances, mémoires), qui tiennent à la société et au train même de la vie ; c’est le moyen, en y revenant souvent, de la pénétrer et de la traverser en bien des sens. […] S’étonnant de n’être pas sensible, comme elle devait l’être, à l’arrivée prochaine d’un ami, elle dira de ses malheurs : « Ils m’ont rendu l’âme si noire, que je ne sens plus le plaisir, je ne fais que le penser. » — Et plus loin : « Le croiriez-vous ? Je pense le plaisir, je le sens presque, et je ne suis pas gaie ; je crois que je ne le serai jamais. » C’est cette personne encore inconnue dans les lettres, n’ayant rien écrit, rien publié, qui un jour, par suite de quoique circonstance tenant à ses persécutions domestiques, tombe brusquement au château de Cirey, aux portes de la Lorraine, et vient demander asile et hospitalité à Mme du Châtelet, à Voltaire. […] Je regarde un homme qui a aimé la poésie, et qui n’en est plus touché, comme un malade qui a perdu un de ses sens. […] Cela me fait mal, parce que je sens le prix de toutes ses bonnes qualités, et que réellement il mérite d’être heureux.