Il opère ou tente une quadruple révolution : une révolution économique, liée aux découvertes maritimes qui transportent du bassin de la Méditerranée aux bords de l’Atlantique le siège du grand commerce, qui ouvrent d’immenses débouchés à l’Europe soit aux Indes soit en Amérique, qui accélèrent la substitution de la richesse mobilière à la richesse terrienne, base du régime féodal ; une révolution intellectuelle qu’on a baptisée la Renaissance et qui n’est pas seulement la résurrection de l’antiquité classique, qui est aussi le réveil de l’esprit d’examen, l’essor de la pensée moderne, le point de départ d’une activité féconde dans les sciences, les lettres, la philosophie ; une révolution religieuse qu’on appelle la Réformation et qui, séparant l’Europe occidentale en deux confessions rivales, cause les guerres les plus atroces dont la différence de croyance ait jamais ensanglanté le monde ; enfin une révolution politique, conséquence des trois autres, qui ébranle les bases de la royauté, suscite des théories libérales et républicaines, des soulèvements populaires et même des appels au régicide. […] Parce que les conditions intérieures et extérieures de la société ont changé ; parce que certaines découvertes et inventions ont été faites par la science et l’industrie ; parce que certains événements ont eu lieu qui ont modifié les choses et les gens ; parce que certaines œuvres ont été composées qui déterminent en partie la nature des œuvres venant après elles. […] Les Parnassiens, nous le rappelions tout à l’heure, prennent le contre-pied des grands poètes qui les ont précédés ; avec Banville, ils s’amusent à parodier le lyrisme ou ramènent d’exil les dieux et les déesses de l’Olympe ; avec Leconte de Lisle, au risque de n’atteindre qu’une petite élite d’initiés, ils refusent de troubler la sérénité de leurs vers par des plaintes oratoires et des élans de sensibilité ; avec Baudelaire, ils recherchent le paradoxe, l’étrange, l’artificiel ; avec Coppée, ils décrivent un coin de banlieue ou content les malheurs d’un petit épicier ; avec Maxime Ducamp ou Sully Prudhomme, ils chantent les miracles de l’industrie ou de la science.