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289. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

dont l’amant se fait gladiateur et se trouve en face d’un inceste quand il s’agit d’épouser la femme qu’il aime… Mais cette histoire, qui aurait pu être dramatique et touchante, surtout à l’heure où le christianisme, sortant comme une aurore des Catacombes, commençait de jeter, avec ses premiers rayons, dans les âmes, les troubles d’une vertu et d’une pudeur inconnus à cet effroyable monde romain qui finissait, cette histoire n’est pour Bouilhet qu’un prétexte : son vrai but, c’est de nous décrire le luxe inouï et les derniers excès d’une société dont les vices sont restés l’idéal du crime, et qui tombe, ivre-morte du sang dont elle a nourri ses murènes, sous la table de Lucullus. Venu l’un des derniers de cette école plastique dont Gautier est le chef puissamment correct et presque radieux, Bouilhet n’a vu la société romaine que par ses côtés matériels d’art compliqué et de corruption colossale : aussi a-t-il reproduit avec la science d’un antiquaire l’inventaire éclatant ou immonde de cette société au temps des empereurs, et s’est-il perdu dans cette abominable immensité.

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