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674. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

C’est son éloquence que vante Racan dans une ode où il ne veut pas rester en arrière de Bois-Robert : Les choses les plus ordinaires Sont rares quand il les écrit, Et la clarté de son esprit Rend les mystères populaires. […] Elles forment, à l’avantage de Balzac, contraste avec la sécheresse des lettres écrites de Rome et d’Italie par Montaigne, resté froid parmi ces grandeurs passées, qui remplissent l’imagination de Balzac. […] A ceux qui reprochaient à Balzac le titre de Lettres donné à ses pièces d’éloquence, disant qu’une inscription si basse ne devait couvrir que des choses ordinaires, ses admirateurs répondaient « qu’il n’avait tenu qu’à la fortune que ce qu’on appelait Lettres n’eussent été harangues ou discours d’Etat ; mais que, dans un pays où la volonté d’un seul avait remplacé le gouvernement populaire, n’y ayant ni peuples opprimés à défendre devant un sénat, ni oppresseurs à accuser, il n’y avait pas lieu à l’éloquence politique ; que quant au barreau, les affaires y étaient tellement étouffées par la chicane, que là non plus il n’y avait pas place pour l’éloquence judiciaire : qu’il restait les chaires des prédicateurs, mais que ce n’étaient pas des hommes tels que M. de Balzac qu’on appelait aux fonctions ecclésiastiques », — allusion à Richelieu, qui l’avait critiqué et ne l’avait pas fait évêque, pas même abbé, à quoi Balzac, dit-on, s’était rabattu ; — « que dès lors il avait fallu que son éloquence s’enfermât dans ce petit espace. » C’est là, en effet, le malheur de cette éloquence. […] Quand l’ouvrage parut, la Sorbonne en approuva solennellement « le style relevé, les paroles choisies, l’éloquence vraiment chrétienne. » Le public resta froid. […] L’enthousiasme tomba ; mais il resta l’estime.

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