La question, posée dans l’Intermédiaire des chercheurs et des curieux l’année dernière, est restée sans réponse. […] Il écrit dans la lettre que je citais tout à l’heure : « C’est à vous, poète et mère, qu’il appartient de recueillir et de rassembler toutes ces chères reliques, toutes ces reliques virginales, car je ne puis m’accoutumer à l’idée qu’elle ait cessé d’être ce qu’il semblait qu’un Dieu clément et sévère lui avait commandé de rester toujours. » Peut-être, parmi les raisons qui l’empêchèrent d’épouser Ondine, faut-il compter ce scrupule et ce respect devant une vierge, et la terreur d’abolir ou seulement de transformer ce par quoi elle l’avait surtout séduit : terreur d’autant plus invincible que celui qui l’éprouve est plus habitué, — et c’était le cas de Sainte-Beuve, — aux rencontres grossières. On peut, quand on a à la fois l’âme délicate et les mœurs cyniques, estimer répugnant de demander à une jeune fille intacte précisément ce qu’on a accoutumé de demander à de tout autres personnes ; on peut très bien, dis-je, rester célibataire toute sa vie par respect des jeunes filles : je parle très sérieusement. […] Il resterait à définir la profonde et l’originale piété de Marceline ; puis à caractériser sa poésie, — poésie d’ignorante géniale, poésie admirablement passionnée et spontanée (parmi quelque naïf fatras) essentiellement musicale, et qui tantôt fait ressouvenir de Lamartine, tantôt fait présager Verlaine.