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750. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

En vain nous chante-t-il Endymion et Phœbé, comme un Grec réveillé tout à coup du sommeil d’Épiménide, et nous traduit-il Sannazar une parenté en génie ; puis, las de tordre et d’assouplir cette ferme langue française qui reste toujours de l’acier, même quand on en fait de la dentelle, se met-il à écrire le sonnet dans sa langue maternelle, la langue italienne, qu’il manie avec une morbidesse fleurie qui eût charmé Pétrarque et qui convient si bien à la nature ingénieuse et raffinée de sa pensée, Gramont est plus qu’un écrivain qui se joue dans les difficultés de deux langues, un archaïste d’une exécution supérieure. […] Seulement, autant, quand il reste le poète d’une cause et des traditions de son berceau, il est au-dessus de l’imitation et des reflets de la Renaissance et trouve sans la chercher cette forme qui n’est ni un vêtement, ni un ornement, mais la splendeur de la pensée à travers les mots qui la voilent et qui la révèlent, autant, quand le souvenir qu’il évoque tient à ces sentiments plus vulgaires que nous avons tous éprouvés, il retombe dans cette forme d’une époque trop admirée et que le progrès serait d’oublier.

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