/ 1957
24. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Sauf dans de courtes nouvelles, nous ne rencontrons guère un héros principal qui soit Italien, Allemand, Espagnol ou Anglais. […] Si, de plus, il sait bien voir, s’il ne croit pas, de parti pris, la société uniquement composée de femmes infidèles, de maris à plaindre, de fats, d’escrocs et d’égoïstes, je demande s’il n’aurait pas quelque chance de rencontrer des exemples de haute et pure vaillance, de dévouement sans espoir, de richesse très simple ou de pauvreté très fière, dans un monde où certaines vertus sont d’une trempe plus fine ? […] Il faut un siège en règle pour conquérir ce héros défiant, et c’est la cordialité seule qui fait parler ce silencieux, l’habitude de faire partie du même horizon restreint, d’être rencontré par lui au détour des routes et surtout la lente persuasion qu’on aime la terre, comme lui, depuis le trèfle d’en bas, depuis la graine non germée, jusqu’au nid de pie qui fleurit noir au sommet des vieux chênes. […] Nous en rencontrions, le dimanche, des milliers, réunis sur une place, en plein vent. […] Les romanciers anglais, pour ne parler que d’eux, se sont plu à composer de ces autobiographies voilées, et les exemples seraient faciles à rencontrer dans Fielding, Smollet, Walter Scott, Dickens, George Eliot.

/ 1957