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250. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Les conversions complètes, quand elles se font tard, laissent l’âme à jamais malade ; à vingt ans on est déjà trop vieux pour devenir philosophe ; celui qui quitte sa religion doit la quitter de bonne heure ; après ce moment, on ne peut plus la déraciner sans ébranler tout le sol. […] À son avis, l’incertitude des gouvernements contemporains, l’impatience des peuples modernes, la fragilité de toutes nos charpentes sociales et de toutes nos machines politiques, n’ont d’autre cause que la chute du christianisme et l’attente d’une religion nouvelle. […] Ayant quitté la religion parce qu’elle manque de preuves, son premier besoin en philosophie fut la certitude. […] Sur vingt hommes qui pensent, il y en a dix-neuf qui, en quittant leur religion d’enfance, tombent dans cette philosophie ; elle n’est qu’un christianisme tempéré et amoindri ; c’est pourquoi elle devait être la philosophie de M.  […] La philosophie est toujours la fille de la religion, fille indisciplinée, qui parfois bat sa mère, mais qui finit par la servir.

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