Ce génie même, quand il a abordé les grands sujets religieux, philosophiques, patriotiques, est quelquefois élevé, mais jamais complétement sérieux. […] L’incurie politique, l’impiété religieuse, l’amour léger, la plaisanterie badine, la licence, la grâce, la poésie, la table, étaient les délices et les célébrités des deux époques ; il y avait plus de talent dans cette société du Temple de Rome, plus de débauche dans celle de Paris ; Horace et Virgile naissaient dans la première, Voltaire dans la seconde ; d’Horace à La Fare, de Virgile à Voltaire, on peut mesurer la distance, mais dans les mœurs et dans les plaisirs parfaite analogie. […] Le poète invoque, il maudit, il condamne ; le vers, de femme dans l’invocation pour son ami, devient viril et de flamme dans l’imprécation contre l’inventeur de la navigation ; puis il devient calme, sévère et religieux dans les considérations sur la sacrilège audace humaine. […] XVI De cette ode politique il s’élève jusqu’au ciel dans une ode religieuse adressée aux Romains pour les menacer de l’expiation de l’impiété du siècle. […] Le voici : Est-ce un de ces poètes confident du cœur, consolateur de l’âme, conseiller des mauvais jours, que les hommes de tous les âges peuvent emporter avec eux dans l’exil, dans l’amour, dans le recueillement de la solitude, dans la douleur des éternelles séparations, dans l’intimité religieuse de leur conversation à voix basse avec le ciel, pour oublier la patrie, pour nourrir les chastes tendresses, pour s’envelopper du mystère des pensées infinies, pour donner des larmes sympathiques à leurs yeux, pour prêter des prières à leurs invocations secrètes, pour verser en eux dans des vers sacrés la foi et l’espérance des réunions éternelles ?