Les mysticités, d’autant mieux accueillies par des hommes turbulents et crédules, qu’elles leur sont plus inintelligibles, soulèveront, ligueront, armeront leur effervescence aveugle et leur indomptable humeur contre l’Islamisme oriental ; et la barbarie européenne, opposée à la barbarie asiatique, se mélangera pour l’embellissement de l’épopée, avec les pompes religieuses, et les règlements politiques et militaires qui accompagneront les meurtres et le brigandage sanctifiés par la délivrance du Saint-Sépulcre. […] quelle religieuse modération ! […] Ni Hésiode, ni Homère, ni Virgile, ni Valérius Flaccus, ni le Tasse, ni Milton, ne font agir ou marcher un personnage sans dire de quel lieu il part, à quel lieu il va, quels sont ses habits ou ses armes, et sans établir dans l’esprit du lecteur les localités et les coutumes, soit religieuses, soit civiles, soit militaires. […] La muse à laquelle Homère commande est reconnue pour une divinité, et son génie qui la maîtrise n’a plus besoin de l’implorer à son aide ; mais l’âme à qui s’adresse Klopstock, n’est que figurément personnalisée ; il faut qu’un être supérieur seconde l’essor de sa pensée en son sujet religieux. […] Dès le second chant, les horreurs de la Saint-Barthélemy se déploient à l’imagination frappée du meurtre de Coligny, et du carnage d’un peuple proscrit par le fanatisme religieux.