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665. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Feuilleter, regarder, nous passons notre existence à cela : Hic sunt tabernacula nostra . […] L’une d’elles, en manquant de respect, tout bas, très fort à sa mère, qui veut l’empêcher de boire du champagne, me conte sa première passion de couvent, son premier amour pour un lézard qui la regardait avec son œil doux et ami de l’homme, un lézard qui était toujours en elle et sur elle, et qui passait, à tout moment, la tête par l’ouverture de son corsage pour la regarder et disparaître. […] Puis, un long moment, elle regarde les choses, avec ces yeux de mourant qui paraissent vouloir emporter le souvenir des lieux qu’ils quittent, et la porte de l’appartement, en se fermant sur elle, fait un bruit d’adieu. […] De ses yeux ouverts et vides, elle regarde vaguement défiler les maisons… elle ne parle plus. […] Revenus chez nous, il a fallu regarder dans ses papiers, faire ramasser ses hardes, démêler l’entassement des choses, des fioles, des linges que fait la maladie… remuer de la mort enfin.

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