» Mais lorsqu’on lui eut porté, quelque temps après, le Dithyrambe sur la Naissance du Roi de Rome : « Allons, dit-il, amenez-le-moi ; aussi bien on voudrait l’empêcher qu’il ne ferait jamais autre chose que des vers. » Et le jeune Casimir lui ayant été présenté, il le reçut comme un fils, lui donna des conseils particuliers, lui fit suivre son cours, le lia avec son autre lui-même, Picard, et insensiblement, bien peu d’années après, Casimir Delavigne, encore très-jeune, était devenu à son tour le conseiller de ses premiers maîtres, surtout de Picard qui lui lisait ses comédies : naïve et touchante réciprocité ! […] Casimir Delavigne a cela de particulier, entre les gloires poétiques de son âge avec lesquelles on l’a souvent comparé, qu’il reçut docilement la tradition des maîtres d’alors, et qu’il n’eut jamais l’idée ni la velléité de s’y soustraire : il pressentait toutes les ressources que son talent en pouvait tirer, et qu’il en serait le rejeton le plus fertile, le plus brillant. […] Je vois devant moi les hommes qui, à des degrés divers, ont donné à la scène française son éclat et ses nuances de nouveauté depuis plus de vingt ans ; ce n’est pas devant ces juges du camp, qui ont pratiqué l’arène, ce n’est pas devant le grand poëte qui me fait l’honneur de me recevoir en ce moment au nom de l’Académie, glorieux champion dans bien des genres, et lui-même l’un des maîtres du combat, que je viendrais étaler et mettre aux prises des théories contradictoirement discutables, tour à tour spécieuses, mais qui n’ont jamais de meilleure solution ni de plus triomphante clôture que ce vieux mot d’un vainqueur parlant à la foule assemblée : Allons de ce pas au Capitole remercier les Dieux !