Il faut pour entreprendre la restitution d’un de ces grands êtres intellectuels qui sont, dans l’ordre de la pensée et de la sensibilité pures, comme les initiateurs d’une espèce morale, qui concentrent et qui exaltent en eux toute l’émotion et la réflexion excitée dans la foule mêlée de leurs admirateurs, remonter des parties éparses de son esprit à leur enchevêtrement et leur engrenage dans le tout, replacer cet esprit ainsi particularisé dans chacune de ces facultés et dans leur association, en un corps dont il sera nécessaire de connaître les représentations graphiques et dont les habitudes ressortiront des témoignages des contemporains : ce corps même et cet esprit, il faudra le prendre dans ses origines, la famille, la race, la nation, — dans son milieu premier, le lieu de naissance et d’enfance, le climat, le paysage, le sol : il faudra le suivre dans son développement et ses relations, de son enfance à sa jeunesse, de ses amitiés à ses liaisons, de ses lectures à ses actes, tracer le cours de ses productions, connaître les joies et les amertumes de sa vie, le conduire enfin à ce déclin et ce décès qui si rarement, pour les grands artistes, sont glorieux, ou fortunés ou paisibles.