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207. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Il touchait à ses années de grâce ; on ne lui demandait pas d’expliquer ces trois rôles contradictoires ; on était convenu de le laisser mourir en sphinx sans lui demander son mot. […] M. de Chateaubriand était un génie, mais c’était aussi un rôle plus qu’un homme ; il lui fallait plusieurs costumes devant la postérité. […] Lucien Bonaparte, jeune homme de Plutarque, à la fois poète, orateur et amant, flottait alors entre le rôle de héros de la république et celui de héros de roman ; sa passion déclamait un peu comme son éloquence ; quoique vêtu en apparence d’une page de Tacite, il écrivait à Juliette des pages de Clélie et de Roméo. […] »   Ces derniers mots furent prononcés avec un accent de chagrin et avec un pli d’irritation sur les lèvres qui me prouva que son prétendu rôle de prince démocratique lui restait lourd sur le cœur. On a beau faire, quand on a du sang de Louis XIV dans les veines, l’orgueil de race prévaut malgré soi sur les nécessités de la royauté : les rôles sont dans la politique, mais les sentiments sont dans la nature.

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