Car il existe entre des états de conscience successifs une différence de qualité, qui fait que l’on échouera toujours à déduire l’un d’eux, a priori, de ceux qui le précèdent. […] Au contraire, pour ma conscience qui percevait cet état interne, point n’était besoin d’une comparaison de ce genre ; l’intensité lui apparaissait comme une qualité inexprimable de l’état lui-même. […] On laisse alors la nature propre de ces phénomènes dans l’ombre, mais on affirme qu’en leur qualité de phénomènes ils restent soumis à la loi de causalité. […] Tel fut l’hylozoïsme antique, hypothèse timide et même contradictoire, qui conservait à la matière son étendue tout en lui attribuant de véritables états de conscience, et déroulait les qualités de la matière le long de l’étendue en même temps qu’elle traitait ces qualités comme des états internes, c’est-à-dire simples. Il était réservé à Leibnitz de faire tomber cette contradiction, et de montrer que si l’on entend la succession des qualités ou phénomènes externes comme la succession de nos propres idées, on doit faire de ces qualités des états simples ou perceptions, et de la matière qui les supporte une monade inétendue, analogue à notre âme.