/ 1999
657. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

Ô fatale puissance ! […] en face de cette anthropophagie mutuelle qui est le crime irrémissible de toutes les races de la création, où il y a un Caïn dans toutes les familles, dites-moi si cette anthropophagie mutuelle n’est pas la fatalité de l’être, la rançon de toute heure de vie par un crime, l’exemple et le conseil du meurtre donné par la puissance créatrice à ses créatures ? […] « Non ce second chaos qu’un panthéiste adore « Où dans l’immensité Dieu même s’évapore, « D’éléments confondus pêle-mêle brutal « Où le bien n’est plus bien, où le mal n’est plus mal ; « Mais ce tout, centre-Dieu de l’âme universelle, « Subsistant dans son œuvre et subsistant sans elle : « Beauté, puissance, amour, intelligence et loi, « Et n’enfantant de lui que pour jouir de soi ! […] Et moi puissé-je, au bout de l’uniforme plaine Où j’ai suivi longtemps la caravane humaine, Sans trouver dans le sable élevé sur ses pas Celui qui l’enveloppe et qu’elle ne voit pas, Puissé-je, avant le soir, las des Babels du doute, Laisser mes compagnons serpenter dans leur route, M’asseoir au puits de Job, le front dans mes deux mains, Fermer enfin l’oreille à tous verbes humains, Dans ce morne désert converser face à face Avec l’éternité, la puissance et l’espace : Trois prophètes muets, silences pleins de foi, Qui ne sont pas tes noms, Seigneur !

/ 1999