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1296. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Enfin, quel catalogue à écrire, la liste officielle de tous ceux qui, pendant dix-huit ans (le règne du roi Louis-Philippe), ont dominé, par leur volonté ou par les grâces éloquentes de leur esprit, cette nation vouée à toutes les puissances de la parole écrite et parlée ! […] Les plus grands noms de la France se sont fait inscrire sur cette longue liste des écrivains périodiques, et, grâce à cet accord unanime, à ce besoin de la publicité sans cesse renaissant, le journal est devenu l’égal de toutes les autres puissances, que ces puissances tiennent l’épée ou le sceptre, qu’elles règnent par la croyance ou par la peur. […] Il n’en voulait ni à l’autorité, ni à la puissance, ni à la fortune, ni à la renommée ; mais il était jaloux de son crédit sur les âmes honnêtes et sur les consciences timorées dont il était l’arbitre souverain. […] Le rédacteur en chef est la puissance invisible de l’armée ; il en est la pensée intime ; il la fait remuer à son gré ; il la précipite, il la modère, il la calme, il l’excite quand il veut, comme il veut. […] C’est qu’à tout prendre, telle est la beauté, la grandeur et la majesté souveraine de cette puissance qu’on appelle le journal, qu’il y a, en ce monde, de la vénération et du respect pour tous les gens qui acceptent cette lourde tâche, quel que soit leur parti.

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