Mettez l’iliade en tableau synoptique, — rien de plus facile ; et, quand vous aurez fini, dites hardiment : « elle est toute là. » le reste, le concert, la couleur, l’émotion, la poésie, c’est nous qui l’ajoutons au poème, nous, dis-je, si nous avons invité à le lire nos puissances de vision, de sentiment et d’intuition. […] l’intellect volontiers exigerait du langage commun des perfections et des puretés qui ne sont pas en sa puissance… je rejetais non seulement les lettres mais encore la philosophie presque tout entière parmi les choses vagues et les choses impures auxquelles je me refusais de tout mon cœur…j’étais fort de mon désir infini de netteté. c’est ici la tentation à son paroxysme ; le « grand refus » du don poétique sur le point d’être consommé ; l’« intellect » narguant la fine pointe de l’âme ; la prose elle-même bafouée comme encore trop semblable à la poésie. […] Bergson, vise à nous faire éprouver ce qu’il ne saurait nous faire comprendre. car l’objet de l’art est d’endormir les puissances actives ou plutôt résistantes de notre personnalité, et de nous amener ainsi à un état de docilité parfaite où nous réalisons l’idée qu’on nous suggère, où nous sympathisons avec le sentiment exprimé. […] Cette tyrannie y dépasserait peut-être de sa puissance le rationnel dominateur dans le poème de la musique proprement dite et dans le poème du verbe. […] Alfred Lartigue n’a pas assez vu que, selon moi, ou plutôt selon la plupart des poètes, qu’ils soient créateurs où restent en puissance de l’être, la poésie dépasse l’esthétique.