/ 3087
492. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Mais, en dehors de ces génies tout individuels de Rabelais et de Montaigne, le xvie  siècle nous montre une quantité d’excellents et vigoureux esprits, de graves et énergiques personnages, qui usèrent vaillamment ou sainement des ressources de la langue à cette époque de confusion et de lutte, et qui, en l’appliquant selon les besoins divers, y mirent encore moins l’empreinte de leur génie propre que celle du parti et de la classe auxquels ils appartenaient. […] Étienne Pasquier, né à Paris en 1529, d’une famille honorablement établie, mais qu’il devait le premier illustrer, se trouva, par la date de sa naissance, en mesure de profiter de toute la science et de l’érudition qui sont propres au xvie  siècle. […] Le goût sera la dernière chose qui viendra en France ; mais, quand il viendra, il sera déjà tard, et le bon sens, si propre à le fortifier et à le soutenir, se trouvera déjà affaibli. […] En conseillant d’imiter les anciens et de les traduire, Pasquier recommande qu’on ne les traduise pas servilement, mais qu’on trouve leur équivalent en français, qu’on fasse surgir s’il se peut, à leur propos, une parole qui vienne de notre propre fonds. […] M. le chancelier s’en contriste : tous les autres y prennent plaisir (1561). » Il gémit de ce vertige presque universel ; il sent que le peuple et la classe moyenne n’ont rien à gagner à ces querelles d’ambitieux qui se servent des passions et des croyances de tous pour arriver à leurs propres fins et se supplanter l’un l’autre : « S’il m’étoit permis de juger des coups, écrit-il, je vous dirois que c’est le commencement d’une tragédie qui se jouera au milieu de nous, à nos dépens ; et Dieu veuille qu’il n’y aille que de nos bourses ! 

/ 3087