L’histoire générale des langues a depuis longtemps amené à constater ce fait remarquable que, dans tous les pays où s’est produit quelque mouvement intellectuel, deux couches de langues se sont déjà superposées, non pas en se chassant brusquement l’une l’autre, mais la seconde sortant par d’insensibles transformations de la poussière de la première. […] Dans l’Inde, c’est le sanscrit, avec son admirable richesse de formes grammaticales, ses huit cas, ses six modes, ses désinences nombreuses, sa phrase implexe et si puissamment nouée, qui, en s’altérant, produit le pali, le prakrit et le kawi, dialectes moins riches, plus simples et plus clairs, qui s’analysent à leur tour en dialectes plus populaires encore, l’hindoui, le bengali, le mahratthi et les autres idiomes vulgaires de l’Hindoustan, et deviennent à leur tour langues mortes, savantes et sacrées : le pali dans l’île de Ceylan et l’Indochine, le prakrit chez les djaïns, le kawi dans les îles de Java, Bali et Madoura.