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244. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Cet éloge du Grand Condé transporta Bussy, et il faut lui rendre cette justice que, si maltraité qu’il fût de ce prince en d’autres occasions, nul ne l’a peint avec plus d’enthousiasme et de feu dans sa beauté martiale. À cette même tranchée devant Mardyck, au moment où il fallait en déloger les ennemis, Bussy, qui est entré par un côté, se rencontre tête à tête avec le duc d’Enghien, qui montait de l’autre, faisant main basse sur tout ce qui se présentait à lui : Je ne songe point, dit-il, à l’état où je trouvai ce prince, qu’il ne me semble voir un de ces tableaux où le peintre a fait un effort d’imagination pour bien représenter un Mars dans la chaleur du combat. […] Il nous le peint, selon son usage, en quelques coups de crayon rapides et heureux : Il avait la tête fort belle, tant pour le visage que pour les cheveux, et c’était un très grand dommage qu’il eut la taille gâtée ; car, à cela près, c’était un prince accompli. […] Il avait l’esprit vif, net, gai, enclin à la raillerie ; il avait un courage invincible ; et, s’il y avait quelqu’un au monde aussi brave que le prince de Condé, c’était le prince son frère. […] Tel était le prince sous qui Bussy voulait aller servir en Catalogne pendant la campagne de 1654 ; il s’accommodait très bien de ce général qui aimait la raillerie, et qui mêlait le badinage et le bel esprit jusque dans les ordres de service qu’il donnait.

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