La révolution de 1830 a trouvé l’art en France à un certain état de développement qu’elle est venue du premier abord troubler et suspendre ; mais cette perturbation ne peut être que passagère : les destinées de l’art ne sont pas un accident qu’un autre accident supprime ; elles vont reprendre leur cours selon une pente nouvelle et se creuser un autre lit à travers la société plus magnifique et plus fertile. […] Cette révolution commença bientôt en effet ; mais elle se fit d’abord un peu à part, et hors de la voie commune de la société ; elle se prépara sur les hauteurs et ne descendit pas du premier jour dans la grande route que suivait cette société rajeunie. […] La Restauration prit la France sur ces entrefaites ; les trois ou quatre premières années en furent peu littéraires ; les factions politiques, les débats orageux et hostiles, les luttes renaissantes de l’ancien régime et de la Révolution tuèrent toute cette frêle poésie delillienne ; mais ce n’est guère qu’en 1819 qu’on voit une poésie nouvelle éclore sur les hauteurs de la société, dans les endroits les plus abrités du souffle populaire et les moins battus de la foule.