De même qu’un enfant ne démêle et ne retient qu’après beaucoup de tâtonnements l’espèce précise et le degré juste d’effort par lequel son bras jettera une pierre à dix pas et non à neuf ou à onze, de même la dame opérée ne put distinguer et fixer dans sa mémoire qu’après beaucoup d’essais incessamment corrigés la sorte particulière, le degré d’intensité, la durée précise de la sensation musculaire que son cou devait éprouver pour que l’inclinaison à droite ou à gauche, l’élévation ou l’abaissement de sa tête et, partant, de son œil, fussent de trois degrés et non pas de deux, quatre ou cinq. […] Pour que cet équilibre soit rompu et que l’image du côté droit se soude par sélection à la sensation survenante, il faut un certain temps, et, d’après l’expérience, ce temps est de sept centièmes de seconde. — En général, entre une sensation et un signal consécutif, il s’écoule deux dixièmes de seconde, et, si la sensation, celle d’un son instantané, d’un choc électrique, d’une étincelle, doit évoquer une image auxiliaire, elle emploie, lorsque cette image n’est pas prête ou se trouve contrebalancée par une autre, un dixième de seconde de plus que lorsque la même image auxiliaire est prête, ou n’a pas d’antagoniste. — Il faut donc aux images un intervalle de temps pour se souder à la sensation, et cet intervalle est d’autant plus long que leur évocation est moins préparée ou plus disputée. […] Après un an, il a parfaitement conscience de l’endroit où on le pince, et il se retourne pour mordre l’instrument. » On voit ici la preuve que l’expérience doit intervenir pour que l’animal puisse situer ses sensations. […] À la fin, le volet disparut, et il vit et reconnut tous les objets dans leurs justes proportions. » (Franz, On the Eye, p. 34, 36.) — Le docteur Franz ajoute : « Puisque les idées sont produites par la réflexion appliquée aux sensations, pour qu’un individu se fasse par la vue une idée exacte des objets, il est nécessaire, dans tous les cas, que les facultés de son esprit soient complètes et aient leur jeu libre.