Mais cette vie ne m’était pas possible ; ce n’était pas là mon rôle, c’était celui de Théodore Kœrner. […] Sans l’hypocondrie et la négation, il serait aussi grand que Shakspeare et les Anciens. » — Je marquai de l’étonnement. — « Oui, dit Gœthe, vous pouvez me croire ; je l’ai de nouveau étudié, et je suis toujours forcé de lui accorder davantage. » La nature de Gœthe était la plus opposée possible à cet étroit sentiment de rivalité et de jalousie qu’on lui prête. […] Oui, oui, mon bon, ce n’est pas seulement en faisant des poésies et des pièces de théâtre que l’on est fécond ; il y a aussi une fécondité d’actions qui en maintes circonstances est la première de toutes… Génie et fécondité sont choses très-voisines… » Et une fois lancé, il ne s’arrêtait pas dans cette veine d’idées ; il montrait dans tous les ordres la force fécondante comme le signe le plus caractéristique du génie : Mozart, Phidias et Raphaël, Dürer et Holbein, il les prenait tous, et celui qui a trouvé le premier la forme de l’architecture gothique, et qui a rendu possible par la suite des temps un munster de Strasbourg, un dôme de Cologne ; et Luther, ce génie de la grande race, et dont la force d’action sur l’avenir n’est pas épuisée.