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391. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Quand, sur un fonds d’organisation héréditaire aussi ferme et aussi nettement tracé, un talent singulier vient à se poser et à éclore, quand un grand don de gloire vient à éclater, quand l’éloquence, par exemple, la parole de feu descend, elle trouve de quoi la porter et l’encadrer : c’est comme l’encens qui d’avance a son autel, c’est comme l’holocauste qui s’allume sur le rocher. […] On sent si bien une puissance qui, du haut de cette chaire, est dans la sincérité de sa direction et dans la plénitude de sa nature, une parole qui a cru entendre son mot d’ordre d’en haut : « N’interrogez pas le cours des fleuves ni la direction des montagnes, allez tout droit devant vous ; allez comme va la foudre de Celui qui vous envoie, comme allait la parole créatrice qui porta la vie dans le chaos, comme vont les aigles et les anges. » Il va donc et nous emporte mainte fois sur les crêtes et sur les cimes ; on frémit, mais il ne tombe pas. […] Rentré de l’école ou du collège, il lui fallait porter le pain chez les clients, se tenir dans la chambre publique avec tous les siens, et subir dans ses oreilles et son esprit les inconvénients d’une perpétuelle distraction. […] La révolution de février 1848 porta le père Lacordaire à l’Assemblée nationale ; il put croire un moment qu’au milieu d’une grande œuvre commune de reconstruction il y aurait lieu quelquefois à une parole religieuse extra-parlementaire.

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