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782. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

La traduction des œuvres de Plutarque ne fut pas un moindre événement dans l’histoire politique de notre pays que dans l’histoire de la littérature. […] Nous avons l’esprit pratique de Rome ; nous tenons d’elle ce goût pour l’universel, qui, dans notre histoire politique, n’est autre chose que cette ardeur de tout conquérir, pour tout régler sur notre patron. […] En littérature, en politique, en religion, chacun disait : Je sais tout. […] Il écrit tour à tour sur la poésie, la médecine, l’histoire naturelle, la politique, les religions, la morale, selon ses humeurs et sa guise ; s’intéressant à toutes ses idées, négligeant les transitions, n’émoussant pas les vives pointes de son esprit dans le travail patient de l’arrangement. […] Elle a l’exactitude de celle de Calvin, avec plus de variété ; elle contient toute celle d’Amyot, aux richesses de laquelle Montaigne ajoute ses propres inventions ; enfin elle réunit tout ce que le xvie  siècle a mis de science et de génie dans la formation de notre langue littéraire, désormais la langue de l’esprit moderne, langue maternelle pour nous, langue adoptive pour quiconque en Europe, dans les lettres, les sciences l’art du gouvernement, dans les travaux de l’esprit ou de la politique, a laissé ou laissera un nom durable.

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