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357. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Aimons donc à le dire : dans la religion, dans la science, dans les arts, dans la vertu politique enfin, ce dernier but de la société civile, il reste encore, il se reproduira sans cesse un levain précieux d’enthousiasme. […] Les crimes de palais, la politique sanguinaire, les massacres en masse, qui étaient encore il y a trente ans le droit commun de la Turquie, lui sont désormais interdits. […] L’œuvre commencée par l’insurrection des villes grecques, par l’incendie de Navarin, par la délivrance de la Morée, par la prise d’Alger, s’achemine à travers les contradictions de la politique. […] L’œuvre avance, au nom de la foi et de l’humanité : on s’engage à poursuivre l’abolition de l’esclavage, comme l’accomplissement même de l’Évangile ; et, malgré les résistances de l’intérêt, les raisons spécieuses de la politique, malgré la difficulté du remède accrue par l’excès du mal, on peut prédire que celle souillure sera un jour écartée du monde américain ; on peut dire au zèle de l’humanité marchant à l’ombre de la croix : In hoc signo vinces. […] Non : les mœurs changent, les formes politiques s’altèrent, les langues se détruisent, et la transplantation des races peut accroître et hâter toutes ces mutations inévitables ; mais l’âme humaine, avec ses points divers et ses touches sonores de sensibilité, de jugement et d’imagination, ne change pas, ne dégénère pas, ne perd aucune des conditions de sa puissance.

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