La mémoire, par exemple, a ses caprices, encore mal expliqués : bien souvent, les noms propres font défaut à l’appel de la pensée ; nous savons pourtant qui nous voulons nommer : son caractère, sa taille, sa profession, ses parents, ses opinions politiques, son vêtement habituel, tout ce qui constitue pour notre esprit la personnalité de l’anonyme, est synthétiquement présent à la conscience ; le nom seul est absent ; il nous revient plus tard, quand nous l’avons cherché, ou de lui-même quand nous ne le cherchons plus. […] L’état de distraction est une circonstance favorable à ces oublis ; on comprend mal un discours mal écouté ; plus tard, on se répète à loisir ce qu’on en a retenu, et l’on comprend mieux [ch.