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241. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il lisait toutes sortes de livres anciens et nouveaux : c’était une nourriture qui lui était nécessaire. « Les jeunes gens surtout, disaii-il, devraient se mettre en tête cette maxime bien véritable, que plus on lit plus on a d’esprit… Celui qui a lu aurait encore plus d’esprit s’il avait lu davantage. » Il lisait toutes les nouveautés, et notait l’impression qu’il en recevait ; il n’était pas de ces dédaîgneurs (comme il les appelle) qui déclaraient d’un livre à première vue que cela ne valait rien ; il lisait jusqu’au bout le livre une fois commencé, biographies, mélanges, anecdotes, même les ana, même les contes de fées ; il les prenait par leur bon côté et y trouvait presque toujours sujet à quelque réflexion, à quelque plaisir : « Je dis à nos amis ordinaires : Que je vous plains de toujours critiquer ! […] En cela ils cherchent leur plaisir et fuient la peine. […] Il n’y introduit en rien le sacrifice, ou du moins ce sacrifice n’est que celui d’un plaisir moindre à un plaisir plus grand. […] Et d’ailleurs n’a-t-il pas dit : On n’a jamais été aussi ingrat que tous les lecteurs de Voltaire le sont à son égard ; j’ai vu de ces lecteurs transportés d’admiration, mais, le livre fermé, se récrier contre l’auteur, et, à force de le haïr, ils trouvent moyen de priser peu ce qui vient de leur donner tant de plaisir. […] Il l’a donc lue avec assez de plaisir une fois, mais il se promet de ne pas la relire.

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