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633. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Joignez-y encore sa noblesse morale, son âpreté, sa puissante colère grondante, exaspérée et acharnée contre les vices, sa volonté roidie par l’orgueil et la conscience, « sa main armée et résolue à dépouiller, à mettre nues, comme au jour de leur naissance, les folies débraillées de son siècle, à imprimer sur leurs flancs éhontés les sillons de son fouet d’acier122  » ; par-dessus tout le dédain des basses complaisances, le mépris affiché « pour les esprits éreintés qui trottent d’un pied écloppé aux gages du vulgaire », l’enthousiasme, l’amour profond « de la Muse bienheureuse, âme de la science et reine des âmes, qui, portée sur les ailes de son immortelle pensée, repousse la terre d’un pied dédaigneux, et va heurter la porte du ciel123. » Voilà les forces qu’il a portées dans le drame et dans la comédie ; elles étaient assez grandes pour lui faire une grande place et une place à part. […] Blessé d’un désir soudain, Volpone se déguise en charlatan, et va chanter sous les fenêtres avec une verve d’opérateur ; car il est comédien par nature, en véritable Italien, parent de Scaramouche, aussi bien sur la place publique que dans sa maison. […] Mettez-vous un instant à leur place, et vous trouverez comme eux que la Femme silencieuse est un chef-d’œuvre. […] qui chaque matin balaye la salle à manger des dieux, et remet en place les coussins qu’ils se sont jetés le soir à la tête164 ?  […] J’en parlerai à part ; il faut, pour en faire le tour, une large place vide.

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