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255. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

  Tous les peuples et toutes les littératures en ont, de ces médailles fortement frappées, qui représentent soit leur originalité particulière de peuple et de littérature, soit, plus souvent, une chose beaucoup plus belle : l’unité de l’esprit humain. Seulement tout peuple et toute littérature pourrait en avoir davantage. […] Il ne met point en suspicion cette soi-disant sagesse, spontanée ou réfléchie, des peuples, sous la dictée de qui auraient écrit, humbles secrétaires, des inspirés comme Salomon ou des philosophes comme Pythagore. […] Or, Rivarol a dit, avec plus de hardiesse que Quitard qui le cite : « Les proverbes sont les fruits de l’expérience des peuples et comme le bon sens de tous les siècles réduit en formules. » Cela est incroyable, mais malheureusement textuel. […] Heureusement pour Rivarol, le mot que cite Quitard ne prouve qu’une chose, assez triste du reste : c’est que le talent le plus héroïquement et le plus fièrement spirituel put se laisser enfiler par une idée vulgaire, comme un grand homme par un goujat ; mais il ne détruit nullement cette certitude : que ce qu’on appelle le bon sens des peuples et des siècles, c’est l’intelligence des grands hommes — ignorés ou connus — qui ont fait tradition et rencontré leur écho.

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