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909. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Il avait vu que Kant, d’abord d’une santé détestable, s’était radicalement guéri de tous ses maux : pleurésies, toux et gravelle, « par la grandeur de ses pensées », et il avait poussé les siennes aussi loin qu’elles pouvaient aller. […] Sans doute, la modération dans les désirs, quand on a le moyen de se modérer, la résignation qui souffre la vie pour moins souffrir de la vie, le calme de l’intelligence qui comprend la nécessité, sont des conditions de santé jusqu’à un certain point, ce qui ne veut absolument rien dire puisque ces conditions sont sans solidité, éternellement menacées par l’imprévu, et peuvent être renversées… par le premier vent-coulis, qui plante un point de côté à Goethe ou à Kant, par exemple, et les emporte, malgré la défense ou le remède de « leurs grandes pensées » ! Il n’y a donc pas de panacée dans le livre du docteur Feuchtersleben ; il n’y a qu’une vieille thèse prise et reprise, l’action bienfaisante de la pensée sur la santé, — à laquelle on en peut opposer une autre, tout aussi vieille et tout aussi soutenue : l’action malfaisante de la pensée.

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