Maintenant il faut que ma pensée se suffise à elle-même, pour se développer, ou pour se modifier au besoin, à mesure que j’avancerai. […] « Plus la civilisation se perfectionne, plus la pensée devient esclave des signes oraux et vocaux, c’est-à-dire de la parole, moins nous avons de pensées sans employer cet ordre de signes : les signes oraux sont tout pour nous ; nous finissons par ne plus évoquer les idées (les rapports rendus concrets et fixés), et par ne plus opérer le rappel des images et des sentiments qu’avec le secours de ces signes. […] Mais à mesure que les mots se créent, que les conjugaisons et les déclinaisons s’établissent, enfin que les formes grammaticales s’organisent, les idées, les pensées (liaisons d’idées), passent dans le domaine de la parole, se fixent dans l’ordre des signes vocaux ; « Et la pensée devient, de plus en plus, dépendante de la parole. […] N’est-il pas évident que l’abstrait se dégage du concret, et que chacun est tenu de faire sa langue pour la conformer à sa pensée ? […] La lettre tue et l’esprit vivifie ; c’est là toute la doctrine de l’affranchissement de la pensée.