On venait de me faire subir un véritable interrogatoire, sur mes pensées les plus secrètes, et j’étais fâchée contre ceux qui m’avaient ainsi harcelée, fâchée contre moi-même aussi, contre moi surtout. […] On eût dit que l’air avait été comme aimanté, par toutes les pensées qui avaient bouillonné dans cet espace, et qu’il en gardait un fluide subtil, dont le magnétisme était perceptible peut-être à la sensibilité toute neuve d’un cerveau d’enfant. […] Que de pensées, en effet, avaient saturé cet air ! […] On m’avait appris que l’on péchait en pensée, aussi bien qu’en action, et puisque j’imaginais des fautes, j’en étais donc vraiment coupable. […] … Ma première pensée fut celle-ci : « Il ne grondera plus », mais je ne pouvais pas me l’imaginer mort, je le voyais au contraire, bien vivant, et plus réellement qu’à l’ordinaire.