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35. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Mais elle a eu peu de peintres de l’art pour l’art, pour la vérité seule de la peinture. […] … C’était audacieux de la peindre, mais, puisqu’on en avait l’audacieuse fantaisie, il fallait la peindre avec l’intelligence des grands peintres, qui sauvent tout des sujets les plus dangereux par la passion et par l’accent de leur peinture. […] Mais j’exige pourtant que l’on sente à quelque chose dans la peinture qu’une conscience morale s’agite dans le peintre ; qu’il y ait, enfin, dans l’artiste, l’être moral sans lequel même le grand artiste n’existe pas. […] Ils peignent leur Rolande et ses vices avec un sans-souci de peintres indifférents à tout ce qui n’est pas la couleur et la plastique de leur peinture, et avec une impassibilité plus légère, mais aussi positive que celle de Flaubert, le plus fieffé matérialiste de peinture qu’il y ait dans ce temps de matérialisme en toutes choses… Ils disent le long de leur roman que Rolande a le don de fascination, ce qui est bien facile à dire quoique pas une seule fois on ne comprenne qu’elle l’ait dans le roman où elle se meut, mais ce don de fascination qu’ils lui ont fait, évidemment elle l’a pour eux. […] Mais peindre la figure d’un monde qui passe, — qui demain sera passé, — voilà où gît l’intérêt de ces peintures, qui fixeront les modes, les manies, les engouements, les frivolités, les passions qui s’envolent chaque jour d’un siècle, sous les yeux charmés de l’avenir.

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