/ 1558
1523. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Ils y cherchaient ce qui y est : la peinture des douleurs et le rêve de bonheur d’une femme célèbre, et ils en suivaient les vicissitudes avec un intérêt passionné jusqu’à la catastrophe, toujours tragique. […] Élevés, vers 1550, par des hommes qui mettaient une admirable perfection déformé dans l’expression de sentiments simples ; appliqués tout d’abord à imiter surtout la forme de ces maîtres antiques ; dans ce moule, toujours respecté, versant ensuite des sentiments plus complexes, mais simples encore, et simplifiés par notre goût de l’analyse ; rêvant, tout comme d’autres, mais de nos rêves n’aimant donner au public que le résultat, la formule réfléchie, l’idée où ils aboutissent, et qui, en tant qu’idée, leur ôte leur caractère, les trahit en les traduisant, et, tout en les exprimant, se moque un peu d’eux ; nous avions créé une littérature d’idées générales très nettes, de sentiments puissants très clairs, de peintures de l’homme très profondes et nullement abstraites, quoi qu’on en ait dit, mais assez peu individuelles pour pouvoir être comprises du premier coup par toute l’Europe. […] Seulement, Chateaubriand dépassa comme artiste l’horizon qu’il avait tracé comme théoricien, et en faisant entrer dans ses œuvres aussi bien l’art antique que l’art moderne, et le paganisme comme le christianisme, et la peinture du monde entier comme celle de lui-même, il donna à l’art du xixe  siècle la vraie indication, qui est que tout ce qui est vivement senti est objet d’art. […] Une seule chambre concentrant tous les pouvoirs, légiférant, administrant, gouvernant, et rien dessous, ni dessus, ni à côté : un roi on peinture, sorte de président ou plutôt de doyen de république, et une assemblée omnipotente, et par-dessous des électeurs et des fonctionnaires : c’était la démocratie pure, la « démocratie royale « comme on disait alors, c’est-à-dire décorée d’un trône.

/ 1558