Richelieu, dans ses Mémoires, a peint admirablement la misère de cette époque antérieure à sa venue, et ce qu’il appelle la lâcheté et la corruption des cœurs : Ce temps était si misérable, que ceux-là étaient les plus habiles parmi les grands qui étaient les plus industrieux à faire des brouilleries ; et les brouilleries étaient telles, et y avait si peu de sûreté en rétablissement des choses, que les ministres étaient plus occupés aux moyens nécessaires pour leur conservation qu’à ceux qui étaient nécessaires pour l’État. […] Et Richelieu, qui nous démêle toutes ces intrigues et nous les peint avec plus d’un trait de Tacite, ajoute de ce Thémines qui arrêta ce jour-là le prince de Condé que, s’il fit bien, aussi crut-il l’avoir fait ; car depuis ce temps-là il ne fut jamais content, de quelques récompenses que le pût combler la reine : Elle le fit maréchal de France, lui donna comptant cent et tant de mille écus, fit son fils aîné capitaine de ses gardes, donna à Lauzières, son second fils, la charge de premier écuyer de Monsieur ; et, avec tout cela, il criait et se plaignait encore : tant les hommes vendent cher le peu de bien qui est en eux, et font peu d’estime des bienfaits qu’ils reçoivent de leurs maîtres ! […] Nous montrant la reine Marie de Médicis forcée alors de quitter le Louvre, accompagnée de tous ses domestiques qui portaient la tristesse peinte en leur visage : « Il n’y avait guère personne, se plaît-il à faire observer, qui eût si peu de sentiment des choses humaines, que la face de cette pompe quasi funèbre n’émût à compassion. » Et parlant de l’odieux et barbare traitement infligé à la maréchale d’Ancre et de son supplice, quand elle fut condamnée comme sorcière à avoir la tête tranchée sur l’échafaud, et ensuite le corps et la tête brûlés et réduits en cendres, il a des paroles d’une haute pitié : Sortant de sa prison et voyant une grande multitude de peuple qui était amassé pour la voir passer : « Que de personnes, dit-elle, sont assemblées pour voir passer une pauvre affligée !