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310. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

— Un mot qui peint la politique présente de casse-cou et de sans lendemain : c’est le mot de Rouher à Vatry, fort effrayé de la situation. […] Elle quitte notre terre empoisonnée de civilisation, et le temps est peut-être proche, où le décor naturel sera contrefaçonné par l’industrie, et où les capitales modernes, les monstrueuses accumulations d’humanités, n’auront plus pour ombre et pour verdure, que le fer-blanc découpé et peint des palmiers de la Samaritaine. […] Là les heures d’anxiété sont maintenant sonnées par une pendule d’or… Regardant cela, nous pensions à la Cour d’assises de l’avenir, dont les boiseries seront en bois de rose, les panneaux en pékin peint d’un ton riant, et où il y aura une vitrine de petits saxes, que les gendarmes montreront aux accusés, pendant les suspensions d’audience. […] Car le côté curieux de cette représentation, ce n’est pas la nature telle que vos yeux la voient, c’est la plus jolie, la plus spirituelle, la plus blonde, la plus colorée peinture qui soit, à ce point que, si par un progrès qu’on peut prévoir, on parvenait à fixer ces images colorées, il n’y aurait plus d’art de peindre. […] Oui, je le proclame avec un certain orgueil, l’amour de la vérité, — cela qui a été l’ambition et la recherche de notre journal, n’a laissé rien filtrer de nos rancunes personnelles ou de nos ressentiments de la critique, dans la portraiture des gens que nous avons peints.

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