Mais cette manière de vivre avait de grands inconvénients pour notre service : restant étrangers à tout ce qui se passait, n’ayant communication d’aucun ordre, nous ne pouvions ni nous instruire de notre métier, ni bien remplir les missions dont nous étions chargés36 » Une première remarque à faire et qui vient aussitôt à l’esprit, c’est combien, dans cet état-major de Ney ainsi gouverné, la situation de Jomini, admis continuellement auprès du maréchal à raisonner et à discuter avec lui, devait sembler à part et tout à fait exceptionnelle. […] Est-il donc nécessaire que dans une armée bien ordonnée les choses se passent ainsi ? Je crois pouvoir affirmer que dans une armée non plus conquérante, non plus individualisée dans un Alexandre, mais toute patriote et toute nationale, elles se passeraient autrement37. […] Ayant reçu l’ordre de rester à Eylau, je passai la nuit couché sur une planche et mon cheval attaché à une charrette, sellé et bridé. […] Le plus court eût été de passer par Pompiken et de joindre la route de Creutzburg ; mais le général Lestocq se trouvait en présence du maréchal : je ne pouvais pas risquer de tomber entre les mains d’un parti ennemi.