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31. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 45, de la musique proprement dite » pp. 444-463

Les signes naturels des passions que la musique rassemble, et qu’elle emploïe avec art pour augmenter l’énergie des paroles qu’elle met en chant, doivent donc les rendre plus capables de nous toucher, parce que ces signes naturels ont une force merveilleuse pour nous émouvoir. […] Il est donc une verité dans les récits des opera, et cette verité consiste dans l’imitation des tons, des accens, des soûpirs, et des sons qui sont propres naturellement aux sentimens contenus dans les paroles. […] Voilà pourquoi l’on s’est servi dans tous les païs, et dans tous les temps du chant inarticulé des instrumens pour remuer le coeur des hommes, et pour mettre certains sentimens en eux, principalement dans les occasions où l’on ne sçauroit leur inspirer ces sentimens en se servant du pouvoir de la parole. […] Le frémissement du feüillage de ces arbres qu’elle imite par son chant, par son harmonie et par son rithme, dispose à trouver de la vrai-semblance dans la supposition qui va leur prêter la parole. […] Elles n’éxigent point du musicien, qu’il assortisse sa mélodie avec les sentimens contenus dans les paroles qu’il met en chant.

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