À genoux, le cœur palpitant, oppressé, il lui semble que sa maîtresse se transfigure ; « sa jeune âme s’envole vers Stella, son nid bien-aimé » ; Stella, « souveraine de sa peine et de sa joie » ; Stella, « sur qui le ciel de l’amour a versé toute sa lumière » ; Stella, « dont la parole bouleverse les sens » ; Stella, « dont le chant donne au cœur la vision des anges295. » Ces cris d’adoration font comme un hymne. […] Il est le premier mouvement du cœur et la première parole de la nature. […] Ils n’ont plus ce trop-plein d’émotions, cette surabondance d’idées et d’images qui forçait l’homme à s’épancher par des paroles, à jouer extérieurement, à miner librement et hardiment le drame intérieur qui faisait tressaillir tout son corps et tout son cœur. […] La sensibilité n’endure rien d’extrême, et les chagrins nous détruisent ou se détruisent… Nous ignorons nos maux avenir, nous oublions nos maux passés par une miséricordieuse prévoyance de la nature, qui nous fait digérer ainsi notre mélange de courts et mauvais jours, et qui, délivrant nos sens des souvenirs qui les blesseraient, laisse à nos plaies saignantes le temps de se refermer et de se guérir. » Ainsi de toutes parts la mort nous entoure et nous presse. « Elle est l’accoucheuse de la vie, et puisque le sommeil son frère nous hante journellement de ses avertissements funéraires ; puisque le temps, qui vieillit de lui-même, nous défend d’espérer une grande durée, c’est à nous de regarder les longs espoirs comme des rêves et comme une attente d’insensés352. » Voilà presque des paroles de poëte, et c’est justement cette imagination de poëte qui le pousse en avant dans la science353. […] C’est Lodowick Bryskett (Discourse of civil life, 1606) qui lui attribue ces paroles.