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362. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Lorsque, depuis les Contemplations, par exemple, jusqu’à ce Quatre-vingt-treize 49, on a examiné, analysé, jaugé, jugé, caractérisé tous les livres qui ont paru de cet infatigable travailleur de la mer… littéraire, comment s’y prendre pour être neuf, quand il ne l’est plus, et pour ne point rabâcher, quand il rabâche ? […] C’est là, par exemple, ce qui lui fait décrire, dans ce livre, avec un détail à empoigner, comme on dit affreusement, l’âme la plus rebelle à le croire, le duel acharné du canonnier et du canon, échappé de son embrasure, roulant, dans l’entrepont, au tangage du navire, et dévastant et brisant tout, comme une féroce bête en fer déchaînée ! […] Enfin, après le ridicule des détails niais et bestiolets, il y a de plus, dans ce Quatre-vingt-treize, l’odieux du pédantisme de l’érudition la plus assommante, la plus vaine et la plus déplacée, et l’odieux aussi de ce matérialisme insupportable, le fond même de la nature, je ne dirai pas philosophique, mais poétique de Victor Hugo, qui ne lui fait pas métamorphoser en or tout ce qu’il touche, comme le roi Midas, mais en matière, — même jusqu’à la langue, qu’il encombre d’images physiques et qui sous cette main épaisse perd de sa transparence, et même encore jusqu’aux sentiments les plus purs et les plus élevés de l’âme, et, par exemple, ici, la maternité ! […] En fait de mères chrétiennes, on y trouve, par exemple, Blanche de Cas-tille, — une sainte qui n’était pas qu’une femelle, qui avait mieux qu’un flair, et dont le fils, le roi saint Loys, n’était pas un petit ! […] Quand Walter Scott veut faire un mendiant écossais, par exemple, il fait un mendiant écossais.

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